KONSTANTIN FISCHER, HANIA, CRETE

Lettre ouverte à un ami allemand

Offener Brief an einen deutschen Freund
Jean-Christophe Cambadélis · 16, Juli 2015

 

Lettre ouverte à un ami allemand

Par Jean-Christophe Cambadélis · 16 juillet 2015

 

 

Mein lieber Freund,

L’histoire, la géographie, la culture aussi: tout nous relie.

L’amitié entre nos deux pays passe pour une des plus solides, des plus profondes qui soient. Elle l’est en effet. Elle est sincère aussi et permet donc que l’on se dise les choses.

Cette amitié aura connu de nombreuses vicissitudes, bien avant et bien après Voltaire et Frédéric II. Elle est le cœur et le moteur de l’Europe.

L’Europe, justement, mon cher ami, ne comprend pas l’obstination actuelle de ton grand pays à vouloir s’enfermer dans ce rôle de petit père la rigueur.

Ton pays aurait-il oublié la solidarité de la France aux lendemains mêmes des crimes atroces commis en ton nom? Oui, au sortir de la seconde guerre mondiale, de cette nouvelle guerre civile européenne, la France aidera au redressement du peuple allemand.

La France emmenée par De Gaulle et l’Europe toute entière avec elle. Avec Churchill, Gaspéri, Adenauer bien sûr. En 1947, le plan Marshall empêcha d’enfoncer encore un peu plus l’Allemagne et exprima, déjà, la force de la solidarité pour panser les cicatrices du passé et penser les contours de l’avenir.

C’est la solidarité de la France et de l’Europe qui permit dans le cadre des accords de Londres de 1953 de réduire considérablement la dette allemande. Berlin doit se souvenir de cette leçon de l’histoire au moment où elle fait la leçon budgétaire à Athènes. Notons d’ailleurs au passage que si nous avions annulé la dette grecque il y a trois ans et si nous avions laissé s’organiser un référendum, nous n’en serions sans doute pas là aujourd’hui.

Revenons à nous. La France pesa de tout son poids dans l’affaire des missiles SS-20, pour protéger le territoire allemand, alors pris entre les mâchoires des deux blocs. A cette époque, les missiles étaient à l’Est et Paris était aux côtés de Berlin Ouest.

Ces gestes de solidarité répétés entre nos deux pays ont fait des ennemis du passé, les amis du présent. On se souviendra aussi de ce moment fait symbole, de cet instant de septembre 1984, où le président Mitterrand et le Chancelier Kohl, main dans la main, font face au catafalque de l’ossuaire de Douaumont et face à l’Histoire. François Mitterrand aimait ton pays. On lui reprocha d’ailleurs d’avoir évoqué le courage des soldats allemands du rang lors de l’un de ses derniers discours officiels, en mai 1995.

Et puis, bien sûr, il y eut 1989, la chute du mur qui marqua la fin de la guerre froide et une nouvelle étape – encore une – dans le renforcement de l’amitié franco-allemande. La France a salué et donc facilité la réunification de l’Allemagne. Elle ne s’est pas opposée à ce que le Deutsche Mark devienne la monnaie unique allemande le 1er juillet 1990, offrant ainsi une monnaie surévaluée à l’ancienne Allemagne de l’est et une politique anti-inflationniste de rigueur à l’Europe.

La France et l’Europe ont permis à l’Allemagne de devenir la puissance qu’elle est aujourd’hui. Oui, l’Allemagne est une grande et belle puissance ! Qu’elle s’en serve non pas pour se faire le porte-drapeau d’un ordolibéralisme étroit et obtus mais pour faire de l’Europe un continent épris de justice dans un monde pris dans l’hélice du profit et agité par le retour des identités.

Berlin doit comprendre que l’Europe ne peut que perdre la course au moins-disant social face à la Chine ou face à l’Inde et que notre modèle social rénové constitue notre meilleur atout dans la compétition mondiale.

Bien entendu, l’Europe ne peut fonctionner que dans le respect des traités et de la parole donnée. Mais, l’Europe doit aussi respecter les peuples et leurs histoires si elle veut prospérer et se réconcilier avec ses propres peuples, si elle veut être autre chose qu’un simple ordre institutionnel moribond.

L’Europe des peuples ne comprendrait pas que l’Allemagne veuille imposer par la force de son économie un modèle économique unique, fait d’austérité idéologique et de pointillisme budgétaire. L’Europe a besoin d’une Allemagne forte bien entendu. Elle a besoin aussi d’une Allemagne solidaire, pas d’une Allemagne solitaire.

L’Allemagne solidaire c’est celle de Jürgen Habermas, à l’opposé de la «dissolution de la politique dans la conformité au marché» que le philosophe allemand dénonçait il y a quelques semaines dans les colonnes d’un quotidien du soir français.

Si l’Allemagne tourne le dos à la solidarité continentale, elle risque d’être incomprise, plaçant de fait l’Europe face à une alternative néfaste, face à un référendum terrible: pour ou contre l’Allemagne.

Mon bon ami, il faut que l’Allemagne se reprenne et vite! Il faut qu’elle se rappelle les leçons d’Helmut Schmidt. Il faut qu’elle se souvienne que l’Europe se fait par des petits pas mais aussi par de grands gestes.

Un mot encore sur notre amitié. La culture européenne est son plus beau fruit, une culture que nous avons en héritage et en partage. Oui, l’Europe a besoin d’un couple franco-allemand revigoré. Tu le sais bien, quand notre amitié prend froid, c’est l’Europe entière qui s’enrhume. Je crois qu’il est temps de mettre en œuvre l’idée trop vite abandonnée d’Assise de la Coopération franco-allemande. Pour voir le chemin parcouru et tracer la route qui mènera nos peuples et notre continent vers la solidarité, la sécurité et la prospérité.

 

Amitiés à toi, santé aux tiens!

 

 

Jean-Christophe Cambadélis

Premier secrétaire du Parti socialiste

 

Offener Brief an einen deutschen Freund
Von Jean-Christophe Cambadélis · 16, Juli 2015

 

 

Mein lieber Freund,
Die Geschichte, die Geographie und auch die Kultur: alles verbindet uns.
Die Freundschaft zwischen unseren beiden Ländern gilt als eine der belastungsfähigsten und innigsten, die es gibt. Sie ist es tatsächlich. Sie ist außerdem ehrlicher Natur und erlaubt es, die Dinge untereinander klar auszusprechen.
Diese Freundschaft ist von vielen Auf und Abs begleitet, sowohl vor als auch nach Voltaire und Friedrich dem Großen. Sie ist das Herz und der Motor Europas.
Europa versteht die augenblickliche Beharrlichkeit Deines großen Landes nicht, sich auf die Rolle des strengen Väterchens zu beschränken - und das zu Recht, mein lieber Freund.
Hat Dein Land etwa die Solidarität Frankreichs vergessen, selbst nach den schrecklichen Verbrechen, die in Deinem Namen begangen wurden? Richtig, am Ende des zweiten Weltkriegs, dieses neuen, europäischen Bürgerkriegs, hat Frankreich das deutsche Volk mit aufgerichtet.
Das von De Gaulle geführte Frankreich und ganz Europa mit ihm - natürlich mit Churchill, Gaspéri, Adenauer. 1947 verhinderte der Marshall Plan, Deutschland noch ein wenig mehr bluten zu lassen und war bereits Ausdruck der Kraft der Solidarität, um die Wunden der Vergangenheit zu heilen und in die Zukunft zu blicken.
Es war die Solidarität Frankreichs und Europas, die im Rahmen der Vereinbarungen von London im Jahr 1953 eine beträchtliche Reduktion der deutschen Schulden erlaubte. Berlin sollte sich jetzt an diese historische Lektion erinnern, wenn sie Athen Lektionen im Haushalten erteilt. Und im Übrigen sollten wir nebenbei festhalten, dass wenn wir vor drei Jahren die griechischen Schulden annulliert und ein Referendum ermöglicht hätten, wir heute ohne Zweifel nicht in dieser Lage wären.
Doch zurück zu uns. Frankreich nutzte all seine Möglichkeiten in der Affäre um die SS-20 Raketen, um das deutsche Staatsgebiet zu schützen, das damals zwischen die Fronten der beiden Blöcke geraten war. In jener Epoche befanden sich die Raketen im Osten und Paris stellte sich an die Seite Westberlins.
Diese wiederholten solidarischen Gesten zwischen unseren beiden Ländern haben aus den Feinden der Vergangenheit Freunde der Gegenwart gemacht. Man wird  sich auch immer an diesen symbolträchtigen Moment, diesen Augenblick im September 1984 erinnern, als Präsident Mitterrand und Kanzler Kohl Hand in Hand auf das Mahnmal des Beinhauses von Douaumont und die Geschichte blicken. François Mitterand hat Dein Land geliebt. Man hält ihm übrigens vor, dass er anlässlich seiner letzten öffentlichen Rede im Mai 1995 den Mut der deutschen Soldaten (von Rang) erwähnte.
Und dann war da natürlich 1989, der Mauerfall, der das Ende des kalten Krieges und eine weitere, neue Etappe in der Vertiefung der deutsch-französischen Freundschaft markierte. Frankreich begrüßte und vereinfachte damit die deutsche Wiedervereinigung. Es stellte sich dem nicht entgegen, als die Deutsche Mark am ersten Juli 1990 die einzige deutsche Währung wurde, und bot somit dem ehemaligen Ost-Deutschland eine überbewertete Währung und Europa eine antiinflationäre Sparpolitik an.
Frankreich und Europa haben Deutschland erlaubt die einflussreiche Nation zu werden, die es heute ist. Ja, Deutschland ist eine große und schöne Nation! Doch es sollte dies nicht nutzen, um sich zum Fahnenträger eines beschränkten und schwerfälligen Ordoliberalismus zu machen, sondern um aus Europa einen Kontinent zu machen, der die Gerechtigkeit in einer Welt vertritt, die in den Teufelskreis des Profits geraten und durch die Rückkehr nationaler Identitäten in Aufregung versetzt ist.
Berlin muss begreifen, dass Europa das Rennen um die niedrigsten sozialen Standards gegen China oder Indien nur verlieren kann und, dass unser erneuertes Sozialmodell unser größtes Kapital im globalen Wettbewerb ist.
Selbstverständlich kann Europa nur mit Respekt für die Verträge und das gegebene Wort funktionieren. Aber Europa muss auch die Menschen und ihre Geschichte respektieren, wenn es gedeihen und sich mit seinem eigenen Volk versöhnen möchte, wenn es etwas anderes als eine weitere sterbende Institution sein möchte.
Das Europa des Volkes würde nicht verstehen, dass Deutschland mit seiner wirtschaftlichen Kraft ein einmaliges ökonomisches Modell durchsetzt, das auf ideologischer Austerität und Haushaltspointillismus beruht. Natürlich braucht Europa ein starkes Deutschland. Es braucht aber ebenso ein solidarisches Deutschland, nicht eines, das im Alleingang agiert.
Das solidarische Deutschland ist das von Jürgen Habermas im Gegensatz zur "Auflösung der Politik im Einklang mit den Märkten", die der deutsche Philosoph vor ein paar Wochen im Artikel einer französischen Abendzeitung anprangerte.
Sollte Deutschland der kontinentalen Solidarität den Rücken zukehren, riskiert es missverstanden zu werden, indem es Europa de facto vor eine verhängnisvolle Alternative bzw. ein schreckliches Referendum stellt: für oder gegen Deutschland.
Mein Guter Freund, Deutschland muss sich besinnen und zwar schnell! Es muss sich an die Lehren Helmut Schmidts erinnern. Es ist notwendig, dass es sich ins Gedächtnis ruft, dass Europa durch kleine Schritte aber auch durch große Gesten entstand.
Ein Wort noch zu unserer Freundschaft. Die europäische Kultur ist seine schönste Frucht, eine Kultur, die wir geerbt haben und teilen. Ja, Europa braucht ein wiederbelebtes deutsch-französisches Paar. Du weißt sehr gut, dass wenn unsere Freundschaft erkaltet, ganz Europa erkrankt. Ich denke, es ist an der Zeit, die Idee, die Grundlage der deutsch-französischen Kooperation ist  und zu schnell ad acta gelegt wurde, in die Tat umzusetzen. Um den begangenen Weg zu erkennen und die Route vorzugeben, die unsere Völker und unseren Kontinent zu Solidarität, Sicherheit und Wohlstand führt.

 

Dir die Freundschaft und Gesundheit den Deinen

 

 

Jean-Christophe Cambadélis

Generalsekretär der sozialistischen Partei (Frankreichs)

 

 

 


Original: www.cambadelis.net/2015/07/16lettre-ouverte-a-un-ami-allemand/